Dans la plupart des procédures d’arbitrage international, qu’il s’agisse d’affaires opposant un investisseur à un État ou de litiges contractuels, la majeure partie des pièces présentées devant le tribunal sont des documents disparates produits en langue étrangère (rapports techniques hautement spécialisés, échanges commerciaux par email, etc.). Inévitablement, nombre d’entre eux sont extraits de textes législatifs de droit interne, de décisions de justice, de documents contractuels ou encore d’autres documents juridiques intéressant le litige. La traduction de ces documents dans la langue de l’arbitrage –l’anglais, le plus souvent – est un préalable essentiel à leur introduction auprès du tribunal. Dès lors, à moins que les arbitres ne maîtrisent couramment la langue originale de ces documents, la valeur probatoire de ceux-ci dépendra naturellement de la clarté et de la justesse de leur traduction.
Pour autant, la traduction figure rarement au rang des préoccupations premières des avocats spécialisés en arbitrage. Ceux-ci la considèrent en effet souvent comme une simple formalité logistique, au même titre que les travaux de reprographie ou de compilation des pièces d’un dossier. À leurs yeux, la traduction n’est qu’un sujet mineur dont un agent interne ou externe au cabinet se chargera tôt ou tard. Il s’agit en somme d’une tâche subalterne, sans lien avec les questions de fond du dossier.
Dans un tel contexte, seul le prix de réalisation de la traduction elle-même est pris en compte. Le coût global d’une mauvaise traduction, au niveau du dossier, est alors soit totalement ignoré, soit mis au rang des faux-frais incompressibles – et fréquemment sous-estimés. Même les juristes les plus éminents ne conçoivent que rarement qu’un élément en apparence aussi insignifiant qu’une traduction, s’il ne fait pas l’objet de suffisamment de rigueur, puisse véritablement faire pencher la balance contre leurs clients, ou du moins gravement desservir leur cause.